Evaluations
Dans l'enseignement, il y a une phase qu'on appelle évaluation, le truc qui permet d'avoir une note à mettre sur le bulletin.
Trois classes, trois évaluations, tout est fini!
Quand j'étais encore du côté élève, je trouvais que c'était facile pour le prof de faire des devoirs sur table: il avait la paix, il glandait pendant deux heures, il faisait autre chose. Bref rien de bien compliqué. Oui et bien maintenant, je vois l'évaluation comme la chose la plus chiante qui puisse être. S'asseoir et attendre que ça se passe...
Trouver les sujets n'a pas été bien compliqué, j'ai été chercher des sujets donnés les années précédentes, et comme il n'existe pas d'annales pour les filières dans lesquelles j'enseigne, je sais que mes élèves ne les connaissent pas.
Deuxième étape: photocopier. Qu'est-ce que c'est dur d'utiliser ce genre de machine! Je me plante une fois sur deux: pas dans le cadre, de travers, à l'envers, pas le bon prototype. Et les élèves, ça pardonne pas ce type d'erreurs: "c'est à la mode depuis quand de photocopier en biais?" l'un d'entre eux m'a fait, "depuis que j'ai appris que ça allait te faire parler", lui ai-je répondu. Ne pas se laisser marcher dessus...
Jeudi 10, 8h du mat', 3h de devoir sur table avec les 1ères STAV. Ca souffle de tous les côtés, "Madame on est obligé de faire?", on trouve les textes trop longs, trop compliqués, trop chiants. De toute manière, jamais rien ne leur conviendra. Taisez-vous et laissez moi me rendormir! Au bout de une heure et demi, je me rends compte que j'ai oublié mon sac à main dans la salle des profs. Je me lève, je sors en leur disant: "je reviens tout de suite, je veux pas de bruit, vous ne communiquez pas entre vous", pfff tu parles! je reviens avec mon sac, je suis morte de rire et eux aussi... Au bout de deux heures, certains ont déjà fini, ils veulent sortir. Pourtant je les ai bien prévenus qu'ils ne pourraient pas sortir avant les 3h, puisque nous sommes sur une heure de cours et que je suis responsable d'eux. Ils cherchent encore à négocier, mais j'ai dit non une fois, ça sera non la deuxième fois. Un peu comme le traiteur intraitable... (je me souviens plus de son nom)
A la troizième heure, un collègue vient me remplacer, j'ai cours avec les S2. Je lui transmets les consignes, en lui disant que maintenant qu'il en est responsable, il peut les faire sortir s'il le souhaite. Ce qui ne se fera pas!
13h20, 2h30 de devoir sur table avec mes prod. Enfin ça n'a pas l'air franchement de les emballer... Je sais plus quoi faire avec cette classe.
P. a passé son temps à me poser des questions sur ma vie privée. J'ai essayé de négocier en lui disant que je répondrai à tout ce qu'il veut, après qu'il aura convenablement fait son devoir. Ca a l'air de le motiver sur le coup, et en fait non... Zut!
Je sors malheureusement mon portable de ma poche, pour voir le temps qu'il leur reste. M. voit la merveilleuse nouveauté de mon appareil: "M'dame, vous avez le bluetooth?" "le blue quoi?" "attendez je cherche votre portable avec le mien" Hein? quoi? comment ça il cherche mon portable avec le sien??? Et là, commence mon instruction sur les nouvelles technologies... Je le rappelle, nous sommes toujours en devoir... Au final, je récolte une sonnerie débile sur mon téléphone, j'échappe aux photos et vidéos obscènes. "Mais euh, vous ne pouvez pas obtenir mon numéro comme ça avec le bluetooth?" Non non... Ouf!
Et ça n'en finit pas... Au bout de deux heures, je décide de les laisser partir, j'en peux plus, je peux rien tirer d'eux. J'ai presque des copies blanches, ça me fera ça en moins à corriger!
Mardi 15, devoir avec les S2. Ils ont du mal à se mettre au travail, mais ils y arrivent... La plus neuneu de la classe n'est pas là (ce n'est pas moi qui le dit, ce sont mes collègues), dommage pour elle, ça lui aurait pas un entrainement pour l'exam de fin d'année, elle en a besoin. Au bout d'une heure, certains me demandent à sortir, pourtant c'est la même consigne qu'avec les autres: NON.
Au bout de deux heures, je les laisse sortir pour que ceux qui n'ont pas fini puissent le faire dans le silence. Ca faisait une heure qu'ils me suppliaient de sortir, maintenant que je les y autorise, ils me regardent et me disent: "ben oui, mais on n'a rien à faire dehors" Bande de...
Z., le petit caïd de la classe, vient me voir à mon bureau avec son petit accent: "M'dame, j'espère que je vais avoir la moyenne", "Z. tu auras la note qui correspondra au travail que tu as fourni", "non non, mais j'espère qu'on s'est bien compris et que je vais avoir une bonne note", je me répète, il se répète. Là je le prends entre quatre yeux: "t'essayes de m'impressioner là ? parce que tu es plutôt ridicule tu sais, et tu me donnes même une raison de te mettre une sale note!" "Le prenez pas comme ça m'dame, je rigole" "et bien, j'espère, maintenant tu sors et tu vas faire mumuse avec tes petits copains" Calmé le p'tit Z., il croit que parce qu'il possède un faciès sémite, il peut se la jouer ptit con de banlieue. Faut pas abuser, on est dans un lycée agricole, lui en bepa secrétariat et il croit me faire peur, pauvre ado...
Quelques minutes après, ils sont dans le couloir, je les prie d'aller dehors discuter parce qu'on les entend trop dans la salle. Pas de bol, ils ont envie de discuter... L'un d'eux, Y., lâche le truc qu'il fallait pas: il sait que ma nièce est dans le lycée, et Ô comme par miracle, ils la connaissent tous. En effet, une brune aux yeux bleus, légèrement pétasse, allumeuse, etc. (c'est de son âge), ça ne passe pas inaperçu! Forcément ils me disent qu'ils sont tous sortis avec, je leur dis qu'avec leurs têtes, ça ne risque pas! Oui, à des moments, il faut être cruel... Mais bizarrement, plus je suis méchante, plus ils aiment, au moins une qualité qu'ils ont et que tout le monde n'a pas: l'humour.
Maintenant il ne me reste plus qu'à corriger... Il me reste deux jours pour corriger 25 copies entières et la moitié de 22 autres. C'est chiant aussi de corriger... Je ne sais pas si je suis trop gentille, trop exigente dans ma notation. Dur dur d'être objective en +.
Oui, j'avoue, je note en fonction des attitudes en classe, et pas seulement des réponses. Quoique bien souvent, l'attitude et la production écrite coïncident...